Candidatures au C.A AG du 21 juin 2014
1. Profession de foi de Jérémy Sinigaglia
Après avoir expérimenté, au cours des douze dernières années, tous les statuts possibles à l’Université, je viens d’obtenir un poste de MCF à l’Institut d’Études Politiques de Strasbourg (concours du printemps 2014). Je suis sociologue et politiste, membre du laboratoire SAGE (Strasbourg). Mes travaux portent sur la sociologie politique (notamment les transformations de l’action publique, les mobilisations de précaires et les recompositions de la « gauche de gauche ») ainsi que sur la sociologie du travail et de l’emploi des professions intellectuelles (artistes et chercheurs).
Je participe, depuis son lancement, à l’enquête sur les budgets et les conditions de travail à l’Université, menée par une petite équipe composée de membres de l’ASES. Ce travail, à la fois scientifique et militant, cherche à analyser les effets de « l’autonomie » des universités sur la vie des professionnels et des étudiants des établissements de l’enseignement supérieur. Les premiers résultats de l’enquête n’ont fait que renforcer ma conviction de la nécessaire action collective que nous devons mener contre les récentes réformes de l’ESR. C’est le sens principal que je donne à ma candidature au CA de l’ASES.
Par ailleurs, doublement qualifié en sociologie (thèse inscrite en section 19) et en science politique, c’est en section CNU 04 que j’ai été recruté ; aussi ma candidature vise également à contribuer à la réflexion, menée notamment à l’ASES, sur le rôle de la sociologie comme science critique et sur la place des enseignants et chercheurs intervenant dans des départements non principalement dédiés à la sociologie et/ou dans des disciplines connexes des sciences sociales.
Jérémy Sinigaglia (36 ans)
2. Profession de foi de Christel Coton
Maître de conférences en sociologie au sein du département AES de l’université Paris 1 où j’ai été recrutée en 2009 et membre du CESSP-CSE, je suis témoin, comme beaucoup d’entre vous, de tout ce que produisent les restructurations imposées, à marche forcée, à l’enseignement supérieur et à la recherche. La baisse chronique des moyens alloués à l’ESR, parce qu’elle va de pair avec de nouvelles modalités de distributions des ressources (individualisation des carrières par la montée de la part des primes, mise en danger du statut national des enseignant-chercheurs, concentration des moyens dans des structures dites « d’excellence » - LABEX, EQUIPEX …), a profondément transformé le paysage de l’ESR, ainsi que l’espace des possibles qui s’offre à ceux ayant choisi d’y engager une carrière ou de s’y former dans le cadre de leurs études. La multiplication des modes de financement par contrats, couplée à la réduction des postes de titulaires dans les universités, condamne une part croissante de jeunes chercheurs à « faire carrière » dans la précarité, prive les étudiants d’équipes enseignantes pérennes et, plus largement, brise l’idée selon laquelle l’enseignement supérieur et la recherche relèveraient d’une mission de service public.
L’ancrage vocationnel de la profession d’enseignant chercheur et l’individualisation à l’œuvre dans notre milieu professionnel ne facilite pas les mobilisations collectives. Si beaucoup partagent les diagnostics négatifs sur les réformes engagées, en pratique, la plupart d’entre nous se retrouvent à contre cœur engagés dans leur application, faute de disposer des ressources argumentatives et juridiques susceptibles de nourrir des velléités de résistance qui restent alors cantonnées dans l’entre soi. La méconnaissance, le manque de temps, le manque de poids institutionnel des enseignants chercheurs en sociologie (qui officient le plus souvent dans des structures pluridisciplinaires où la sociologie peut se voir marginalisée), participent à faire des EC les propres acteurs de ce qu’ils dénoncent par ailleurs.
Une association professionnelle telle que l’ASES constitue pour moi une ressource rare dans ce contexte. Parce qu’elle repose sur un collectif « choisi » et non imposé par les logiques de regroupements institutionnels fondés sur les seuls critères d’une « excellence » aux contours non réfléchis, elle rend possible l’existence et l’entretien d’une parole alternative susceptible de nourrir des ripostes sur les fronts qui ne cessent de se dresser dans nos institutions respectives. Enfin, en centralisant, en produisant et en mettant à disposition de la communauté universitaire, des ressources susceptibles d’armer les projets et les actions des uns et des autres, elle constitue une réponse aux dégradations des conditions de travail (enseignement et recherche) auxquelles nous devons faire face dans nos établissements de rattachement.
Ma candidature au CA de l’ASES s’appuie ainsi sur une triple aspiration qui fait écho au travail mené de longue date par l’association :
- La volonté de participer au travail de contre feux engagé contre les représentations associées à notre discipline et à nos étudiants dans l’espace médiatique et académique.
- la volonté de participer à la diffusion de toutes les ressources (informationnelles, juridiques, pratiques) pouvant permettre à ceux qui ne souscrivent pas aux orientations politiques et institutionnelles actuelles, d’être « à la barre » sur leurs terrains respectifs, c'est-à-dire tous ceux où ils ont encore une voix à faire valoir.
- Et enfin, la volonté de participer à l’entretien et à l’amélioration de la transparence des procédures de qualification, de recrutement et de promotion dans nos institutions respectives, et ce pour maintenir à son plus haut niveau la qualité des recherches et des enseignements proposés dans l’Université et la recherche publique.
Christel Coton, Maître de conférences en sociologie, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne; CESSP-CSE
3. Profession de foi de Laurent Willemez
4. Profession de foi d'Artemisa Flores Espínola
Je suis titulaire d’un doctorat européen de sociologie obtenu à l’Université Complutense de Madrid en 2013, et chercheuse associée à l’équipe Cultures et Sociétés Urbaines du CRESPPA, et mes travaux relèvent de la sociologie des sciences et du genre. Comme plusieurs de mes collègues, j’ai fait ma première campagne de recrutement sans succès cette année et on sait très bien que pour beaucoup d’entre nous le chemin à parcourir sera de plus en plus long.
Ces dernières années, l’emploi dans le milieu universitaire et de la recherche s’est profondément dégradé, particulièrement pour les doctorant.e.s non financés, les docteur.e.s sans poste et les postdoctorant.e.s en CDD de notre discipline. La précarisation est de plus en plus massivement partagée, elle est sur le point de devenir une norme qui met en cause l'égalité de traitement entre les individus et mine la liberté d'initiative propre au travail de recherche. Pour nombre d’entre nous, les vacations, contrats courts, RSA, périodes de chômage, situations d’endettement, périodes sans ressources, etc., s’enchaînent et compliquent une insertion professionnelle stable dans l’enseignement supérieur et la recherche. Et cette tendance n’est apparemment pas prête de s’inverser puisqu’on assiste encore aujourd’hui à une réduction massive des postes d’ATER, avec la suppression quasi-complète des postes à mi-temps.
Dans ce contexte difficile, le rôle essentiel joué par l’ASES contre la LRU, l’importance scientifique de sa liste de diffusion, ainsi que les efforts de ses membres en faveur d’une plus grande transparence des procédures de qualification et de recrutement dans notre discipline, me portent résolument à présenter ma candidature pour rejoindre le CA de l’association. Très mobilisée ces dernières années contre ces réformes, j’ai ainsi décidé de me porter candidate pour participer à la réflexion collective sur ces questions, et notamment sur les conséquences de ces politiques pour les enseignant.e.s chercheur.e.s (évaluations, marchandisation de savoir…) ainsi que pour la production et reproduction du savoir en sociologie. En outre, étant également très investie depuis quatre ans en tant que co-responsable du réseau thématique 24 « Genre, Classe, Race. Rapports sociaux et construction de l’altérité » au sein de l’AFS, je souhaite également poursuivre et appuyer les efforts entrepris par le CA pour favoriser la concertation entre les associations professionnelles de la discipline et d’autres disciplines proches.
Enfin, me trouvant actuellement au Mexique où j’ai l’opportunité de dispenser pour l’été quelques heures d’enseignement hebdomadaires, je ne pourrai pas être présente lors de l’assemblée générale. Je le regrette vivement et vous prie de bien vouloir m’en excuser.
Artemisa Flores Espínola
5. Profession de foi de Jean-Luc Richard
Je propose ma candidature pour continuer à faire vivre l’association qui est notre patrimoine commun. Je suis devenu élu au CA en 2001, puis ai été réélu en 2005, 2008 et 2011. En 2009, je me suis fortement impliqué dans le mouvement contre la réforme du statut et contre les réformes Pécresse ; j’ai représenté les collègues grévistes de mon UFR, puis l’ASES, à 5 coordinations nationales, travaillant à l’unité du mouvement. Je suis membre de l’ASES depuis décembre 1999, initialement invité à l’association par des collègues. J’ai connu les différentes périodes de l’association et en retiens qu’elle me semble toujours indispensable dans notre champ. Je suis persuadé que la période qui s’ouvre sera celle de nouvelles mobilisations : mobilisation pour les questions de moyens, de place de notre secteur « sociologie, démographie », donc de postes pour les jeunes docteurs. Les questions de positionnement des EC de notre section dans le paysage de la recherche internationalisée sont aussi des questions qui sont essentielles. Faute de moyens et de reconnaissance des acteurs ordinaires de l’ESR français, nous pouvons craindre un décrochage de l’Université française dans les échanges scientifiques internationaux, sur fond de favoritisme pour quelques établissements seulement. Mes séjours d’enseignement à l’étranger m’en ont convaincu.
Notre association joue un rôle de veille essentiel. Le fait qu’elle soit pluraliste l’est tout autant. Pour ce qui concerne l’orientation de l’ASES, je suis très attaché à l’unité des forces progressistes s’opposant aux dérives néolibérales qui affaiblissent la grande majorité de nos établissements, et je suis élu au C S de mon université sur un tel positionnement unitaire. En poste dans une université à forte dominante « sciences mathématiques, expérimentales et médicales», où les évolutions sont contrastées, complexes et trop souvent néfastes, je souhaite continuer à contribuer aux actions de l’ASES mais aussi à une certaine réflexivité car les politiques menées depuis dix ans provoquent une augmentation des différences et inégalités entre nos établissements et aussi entre les disciplines et cursus.
Jean-Luc Richard, 43 ans, maître de conférences à l’université de Rennes 1 (CRAPE UMR CNRS 6O51) depuis 2000, après avoir été chargé de recherche (UMR 7048)
6. Profession de foi de Matthieu Hély
7. Profession de foi de Maricel Rodríguez Blanco
Doctorante en sociologie politique à l’EHESS, et membre de l’ASES depuis le Congrès de sociologie organisé par l’AFS en septembre 2013, je présente ma candidature au CA de l’ASES.
En fin de thèse, mes recherches portent sur les organisations militantes de chômeurs argentins et leur rapport à l’État. Actuellement chargée de cours à l’université en tant que vacataire, j’ai enseigné deux années comme ATER en sociologie et en espagnol, puis connu le chômage, l’endettement, et les différents statuts précaires qui lui sont associés (RSA, ASS, etc.).
Dans ces conditions de plus en plus éprouvantes (parce qu’elles menacent la pratique même de l’enseignement et de la recherche) qui sont également celles de tou-te-s les doctorant-e-s et docteur-e-s non financé-e-s disposant de ressources économiques précaires comme vacataires, mais souvent aussi contraint-e-s de renoncer à enseigner à défaut d’« employeur principal » ou de statut d’ « auto-entrepreneur », il me semble fondamental et urgent de s’impliquer dans une association professionnelle comme l’ASES, engagée dans les luttes contre la précarisation de l’enseignement supérieur et de la recherche en France (mais également dans d’autres pays).
Participer aux débats collectifs et aux actions menées par l’ASES (sur l’état de la recherche et de l’enseignement, nos conditions de travail, les postes et procédures de recrutement, …) et ce, d’autant plus qu’il s’agit d’une démarche qui intègre les doctorant-e-s et docteur-e-s souvent isolé-e-s pendant le long chemin de la thèse ou de l’après-thèse, prend également tout son sens pour valoriser la place de la sociologie dans le contexte national et international.
Enfin, ayant enseigné la sociologie comme ATER dans des cursus professionnels (à l’Université de Blaise Pascal et à l’Université de Strasbourg) et comme chargée de cours à Sciences po, j’ai pu expérimenter de près les difficultés de former les étudiants aux outils de pensée sociologique. Je suis donc particulièrement soucieuse d’aborder les questions de l’enseignement sociologique à des non-sociologues qui sont elles aussi au cœur de l’ASES.
C’est pour toutes ces raisons, et bien d’autres encore, que je souhaite rejoindre le CA de l’ASES.