Contre les menaces sur la liberté académique. Poursuivre la mobilisation en défense de Pinar Selek
Poursuivre la mobilisation en défense de Pinar Selek
Le 28 juin 2024 se tenait à Istanbul la 3ème audience du 5ème procès contre l’intellectuelle franco-turque Pinar Selek. Lors de cette audience, le régime turc, par la voie de ses services de police, s’en est pris à l’université et à la recherche françaises en assimilant une conférence académique à un événement de « l’organisation terroriste PKK ». Ce qui est totalement faux. Il s’agissait d’une table-ronde animée par Pinar Selek, qui s’est tenue le 11 avril 2024 dans le cadre du festival « Printemps des migrations », à Nice, sous la responsabilité de l’Université Côte d’Azur, de l’Université Paris Cité, du CNRS et de l’IRD. L’audience a été reportée au 7 février 2025, les juges exigeant à nouveau l’extradition de notre collègue, afin de l’entendre. Rappelons que Pinar Selek se trouve toujours sous le coup d’un mandat d’arrêt international avec demande d’emprisonnement immédiat et pourrait parfaitement être entendue depuis un tribunal français, par voie de commission rogatoire.
Cette nouvelle accusation a pour objectif de forcer Interpol à produire une notice rouge en vue d’obtenir l’extradition de notre collègue et ainsi de la faire taire, tout en intimidant son entourage professionnel et ses soutiens. Voici ce que Pinar Selek nous écrivait à l’issue de l’audience du mois de juin :
« Connaissant ce pouvoir politique, je sais que cet acte fait partie d’une stratégie élaborée. Il me faut donc construire une stratégie de "persister et signer". La perte de l’autonomie de la pensée peut se faire de manière très insidieuse. Le pire serait de faire profil bas. Ce n’est pas mon choix.
Je poursuivrai mes activités scientifiques sans me priver de certains sujets. Surtout, je suis en train de finaliser un livre qui représentera une charnière dans cette histoire. Vous lirez bientôt ma parole sur ma recherche confisquée et qui saigne en moi depuis 26 ans. (…)
Ils ont réussi à me couper de mes terrains de recherche en m’enfermant dans le territoire français. Je ne leur permettrai jamais de limiter ma pensée. Je sais que ma persistance n’est pas un acte individuel et fait partie d’une lutte collective. Mais j’ai terriblement besoin de nourrir mon courage avec le vôtre. »
Nous avons également appris que les juges en charge de l’affaire à la 15e chambre de la Cour d’assises d’Istanbul ont été révoqués cet été : le fait qu’ils aient été remplacés par d’autres juges, connus pour la lourdeur de leurs verdicts dans des affaires assimilables, nous fait redouter une immixtion supplémentaire du politique dans le juridique.
Aussi, devons-nous plus que jamais poursuivre la mobilisation académique pour obtenir la tenue d’un procès indépendant, dans lequel Pinar Selek pourra être auditionnée depuis un tribunal français, et qui débouchera, comme toutes les fois où l’affaire a été jugée sur pièces, sur un nouvel acquittement. Notre collègue doit retrouver son honneur bafoué depuis 26 ans et sa liberté de travailler, de s’exprimer, et de circuler librement. Sa sécurité, menacée jusque sur le territoire français, doit être assurée par les autorités compétentes. Le pouvoir turc doit cesser de diffamer nos institutions scientifiques, en cherchant à brider la liberté académique de l’enseignante chercheure Pinar Selek comme notre mobilisation sans faille à ses côtés.
Nous relançons celle-ci aux côtés de nombreux autres collectifs et associations professionnelles parmi lesquels les sociologues, politistes, ethnologues et anthropologues de l’ASES, l’AFS, l’AFSP, l’AECSP, l’ANCMSP, l’AFA et l’AFEA et OALA.
Vous recevrez plusieurs mails à ce sujet d’ici au 7 février 2025. Merci de prendre le temps de les lire, de les diffuser largement et d’agir, à l’échelle locale, nationale et internationale.
D’ici là, vous pouvez amplifier la mobilisation en diffusant ces éléments dans vos réseaux (professionnels, citoyens, médiatiques et politiques, nationaux et internationaux) ; abonder la cagnotte de solidarité, nécessaire support de mobilisation ; préparer la prochaine échéance du 7 février 2025 en envoyant des représentant.es de vos instances académiques à Istanbul (délégation internationale : écrire à justice@pinarselek.fr).