Candidatures pour le CA de l'ASES, AG du 13 juin 2015

Professions de foi

Eric Marlière
Maître de conférences à l’université de Lille 3, j’ai l’honneur de me présenter à un second mandat au bureau de l’ASES afin de poursuivre mon travail relatif à la question du champ de l’intervention sociale et de son enseignement au sein des départements carrières sociales. Même si je peux me réjouir (temporairement) de la non-création des hautes écoles en travail social, enseigner la sociologie au sein de ce champ reste incertain et paradoxal pour un ensemble de raisons :

  • la sociologie ne constitue pas – on peut le comprendre – une priorité pour les étudiants inscrits dans un cursus en animation, en éducation spécialisée ou pour devenir assistant social ;
  • les attentes du diplôme d’État ont de plus en plus intériorisé le « nouvel esprit du capitalisme » avec le paradigme managérial qui se concrétise dans les mémoires d’éducateurs à travers la méthodologie de projet pas toujours en adéquation avec nos enseignements.

C’est pourquoi, lors de ce second mandat, je resterai vigilant face aux stratégies velléitaires de certains acteurs du travail social à l’égard de l’université et en particulier de la sociologie (au sujet de la création des hautes écoles par exemple). De plus, j’essaierai d’impulser une réflexion quant aux questions pédagogiques, relatives à notre discipline, afin de mobiliser davantage les étudiants en carrières sociales et d’infléchir les nouvelles normes managériales du diplôme d’État. Éric Marlière, le 31 mai 2015

 

Romain Pudal
Docteur en sociologie de l’EHESS, j’ai été recruté au CNRS et affecté au CURAPP-ESS à Amiens il y a trois ans ; j’ai aussi enseigné dans différentes universités (Marne-la-Vallée, Clermont-Ferrand, Paris 1, Amiens) en AES, sociologie, science politique et dans des formations pour adultes. Je suis impliqué dans l’Association Française de Sociologie en étant élu depuis 6 ans au comité exécutif. Depuis plusieurs années, je ne peux que constater comme beaucoup la dégradation continue et grandissante des conditions d’études, de travail, de recrutement aussi bien pour les étudiant-e-s que pour les collègues, titulaires et plus encore non-titulaires : la précarité dans l’ESR, considérée par certain-e-s comme un mode de « gouvernance » normale, est à mes yeux un véritable fléau. J’estime que cette question qui touche au premier chef celles et ceux qui cherchent un poste, doit être au cœur des préoccupations des titulaires. La multiplication des « réformes » va systématiquement dans le sens de cette précarisation de tous les personnels de l’ESR et nuit clairement à la qualité des formations proposées : je ne détaillerai pas ici les contrats de travail iniques qui font régulièrement débats sur la liste de l’ASES, la baisse de l’offre de formation pour des raisons budgétaires, le gel des postes, les universités en faillite, les aberrations des PPP, etc. Tous ces constats sont connus de (presque) toutes et tous, et la soi-disant « autonomie » a surtout autorisé tous les mécanismes de dérégulation et les comportements les plus critiquables. Face à cela, je crois que nous pouvons et devons nous organiser collectivement grâce notamment aux associations professionnelles, au premier rang desquelles l’ASES qui est devenue incontournable sur tous ces fronts : journées et AG de l’ASES, publications du Bulletin, wiki-auditions dont le succès prouve que les exigences de transparence et de régulations sont immenses, liste de diffusion abritant des informations, des débats et parfois des polémiques pour le moins utiles. Depuis plusieurs années, j’essaie de travailler au rapprochement de nos associations afin de construire les outils de régulation et de transparence dont nous avons manifestement besoin : la journée « misère de postes, recrutements misérables » du 31 janvier a montré que nous pouvions agir collectivement (en associant d’autres organisations comme l’ANCMSP, l’AECSP notamment) avec ces objectifs. C’est le sens de ma candidature au CA de l’ASES : renforcer les liens entre nos organisations pour donner plus d’envergure et d’impact à nos luttes, construire des outils collectifs de régulation, en un mot ne pas laisser la soi-disant autonomie rimer avec anomie. Romain Pudal, le 31 mai 2015

Ariel Sevilla
En 2011 j’ai été recruté comme maître de conférences en sociologie à l’université de Reims où je suis rattaché au laboratoire Cerep. Mon activité associative en France et dans le champ de la sociologie commence en 2006, à l’AFS (où j’ai été d’abord salarié à mi-temps – ce qui m’a permis de financer la dernière partie de ma thèse -, puis élu pendant un mandat (2009-2013)). A l’AFS, je me suis occupé de nombreuses tâches depuis la feuille d’infos de l’association, en passant par le site internet, le lien avec les adhérents, l’intervention dans les activités propres aux congrès et plus largement la préparation de ces congrès. En poursuivant ces engagements, je souhaite porter ma candidature au CA de l’ASES pour contribuer à faire vivre cet espace de discussion démocratique essentiel pour les enseignants-chercheurs dans la conjoncture actuelle. Ces espaces font défaut alors qu’il me semble que nous avons grand besoin de ces lieux : pour déployer une analyse autonome et pour agir collectivement contre la politique dont est victime l’université publique et nous avec elle. L’ASES doit maintenir son rôle de soutien aux débats et aux questionnements pédagogiques. J’accorde d’autant plus d’importance à cette dimension de l’activité portée par l’ASES qu’une partie de mon service a lieu dans un IUT et l’autre dans des diplômes autres que la sociologie. Dans ce sens, il me semble nécessaire de diversifier au sein du CA de l’ASES les préoccupations pédagogiques et les expériences dans les différentes composantes de l’université où l’on retrouve l’enseignement de la sociologie. Cependant, dans les conditions présentes, il est également nécessaire que l’ASES poursuive l’action politique qu’elle a eue ces dernières années. La sanction de la LRU et ensuite de la Loi Fioraso a organisé une fausse autonomie pour l’enseignement supérieur et la recherche qui prend dernièrement la tournure des regroupements forcés d’établissements (COMUes) éliminant ce qui pouvait rester de démocratie interne et de collégialité des pairs. L’accroissement de l’inégalité entre établissements, sous couvert d’une politique « d’excellence » et de labels, contribuent à concentrer le pouvoir et les ressources. Au quotidien, ce qu’on expérimente c’est une forte dégradation des conditions de travail. Et ceci n’est pas que le sort de titulaires. Pour ceux qui ne le sont pas, l’université qu’on nous propose aujourd’hui offre, avant tout, une installation durable dans la précarité. Cette perspective de travail et de vie n’est pas acceptable. L’ASES me semble indispensable aujourd’hui pour défendre une autre université et un autre enseignement de la sociologie et j’aimerais y contribuer. Ariel Sevilla, Le 2 juin 2015

Alina Surubaru
En tant qu’enseignante (vacataire, puis titulaire) dans plusieurs institutions de l’enseignement supérieur, j’ai souvent entendu dire « Tout le monde ne peut pas être chercheur ! », « Dans ce milieu, il n’y a pas de place pour tout le monde », « On ne peut pas envoyer nos étudiants au casse-pipe »… Ceci est certes, une évidence, mais est-ce que cette évidence justifie-t-elle l’industrialisation de l’offre d’enseignement, l’investissement a minima dans l’encadrement des travaux de recherche et le découragement systématique des étudiants en sociologie dans la poursuite d’une éventuelle carrière universitaire ? Peut-on encore donner envie de faire de la recherche dans un monde académique traversé certes, par des problèmes budgétaires, mais structuré surtout par des querelles de pouvoir ? Je suis convaincue que le manque d’imagination sociologique dans l’enseignement des sciences sociales est tout aussi dangereux pour l’avenir de notre discipline que la dégradation des comptes de l’Université. Mener une réflexion collective à plusieurs niveaux sur nos pratiques pédagogiques est selon moi une démarche importante, dans laquelle je suis prête à m’investir. Cette réflexion pourrait prendre par exemple la forme d’une collecte d’information au sujet des « cours qui marchent », des projets pédagogiques qui semblent réveiller l’intérêt des étudiants en sociologie. Puis, dans un second temps, cette réflexion pourrait permettre l’émergence des projets communs entre plusieurs universités (enquêtes collectives, échanges d’expérience, etc.). C’est donc le sens de ma candidature au CA de l’ASES. Alina Surubaru, le 3 juin 2015

Ana Perrin-Heredia
Actuellement chargée de recherche CNRS à Amiens (Curapp-Ess), j’ai été élue au CA de l’ASES en 2012 alors que j’étais encore post-doctorante. Si je propose ma candidature pour renouveler mon mandat d’administratrice, c’est donc cette fois en tant que titulaire. Parce que je n’oublie pas que ce nouveau statut m’a fait basculer du coté des « privilégié.e.s », j’entends renforcer mon soutien aux revendications des précaires de l’ESR dont les conditions d’emploi sont le reflet de la situation, dramatique, que connaissent aujourd’hui l’enseignement et la recherche à l’Université. En cas de réélection, je continuerai ainsi à collaborer à l’enquête sur les comptes et les conditions de travail à l’Université, réalisée par un petit groupe composé de membres de l’ASES. Je m’impliquerai également dans la lutte entamée par l’ASES au côté des autres associations professionnelles en œuvrant notamment à leur rapprochement afin d’accroître notre capacité à peser sur les instances décisionnaires et à influer sur le nombre de postes ouverts dans nos disciplines. Je m’investirai pour développer les actions entreprises en vue d’améliorer les conditions de recrutement de nos futur.e.s collègues mais aussi pour ouvrir plus largement le débat sur les inégalités que ces procédures sont susceptibles de renforcer afin que, collectivement, nous trouvions des solutions pour les réduire (à défaut de pouvoir les éradiquer). Enfin, parce que j’enseigne toujours la sociologie à des étudiants (notamment en économie) tout autant qu’à des travailleurs sociaux en exercice, je poursuivrai mon implication dans les réflexions portées par l’ASES autour de la pédagogie, en particulier lorsque l’enseignement de notre discipline se destine à des non-spécialistes. Ana Perrin-Heredia, le 5 juin 2015

Hélène Ducourant
Je suis maîtresse de conférences à l'Université Paris Est Marne la Vallée et membre du laboratoire LATTS depuis deux ans. Avant cela, j'ai été étudiante en Sociologie à Lille, doctorante au CLERSE et « post doc » pendant trois années dans différents labos. Je pose ma candidature pour intégrer le CA de l'ASES aujourd'hui pour deux raisons. La première est à rechercher dans mon parcours : en tant qu'ancienne docteure sans poste, je suis sensible aux questions de précarité dans l'ESR. A Lille, j'ai participé à de nombreuses actions collectives pour informer et lutter contre la précarisation de notre milieu. Je co-organisais par exemple les AG de docteurs sans poste pendant le mouvement anti-LRU. Passée de « l'autre côté » je souhaite à présent poursuivre mon engagement sur ce thème via l'ASES. La seconde est liée à ma pratique actuelle. En tant qu'enseignante, j'ai le désir d'intéresser les étudiants et de les faire progresser. Pour cela, j'ai transformé certains TD en ateliers d'enquête collective. A la rentrée prochaine, j'ajouterai une dimension supplémentaire à ces ateliers : la tenue de carnets de recherche (blogs) par les étudiants de licence. En intégrant le CA de l'ASES, je souhaite contribuer aux réflexions sur les questions pédagogiques, notamment celles relatives aux usages des outils numériques. Hélène Ducourant, le 5 juin 2015

Violaine Girard
Maîtresse de conférences au département de sociologie depuis cinq ans et élue au conseil de l’UFR des sciences de l’homme et de la société de l’Université de Rouen (depuis un peu moins de temps !), les activités de l’ASES ont constitué pour moi autant de moments indispensables d’information, de réflexion et de mobilisation au vu des transformations en cours de l’université, des évolutions des conditions d’emploi et de travail des collègues travaillant sous différents statuts comme des conditions d’étude des étudiant-e-s des divers cursus dans lesquels la sociologie est enseignée. Après avoir siégé ces deux dernières années au sein de la section 19 du CNU comme membre élue, je souhaite apporter ma contribution aux activités de l’ASES en présentant ma candidature au CA. Cette association offre à mes yeux un espace d’organisation incomparable pour se saisir collectivement des enjeux qui se posent sur le plan disciplinaire et sur celui de l’avenir de l’enseignement supérieur et de la recherche (contraintes pesant sur les pratiques pédagogiques, effets des modalités de « gestion » des universités et de leurs composantes, conditions de travail, etc.). C’est pourquoi j’espère pouvoir contribuer à la suite des actions déjà initiées par l’ensemble des membres de l’ASES. Violaine Girard, le 6 juin 2015

Jean-Baptiste Comby
C’est avec plaisir et motivation que je vous présente aujourd’hui ma candidature pour rejoindre le Conseil d’Administration de l’ASES. Étant Maître de conférences à l’Institut Français de Presse de l’Université Paris 2, c’est-à-dire dans une des universités les plus riches de France, je peux observer « par le haut » les inégalités qui frappent l’ESR. Cette position m’amène notamment à apercevoir certaines facettes de la LRU qui sont sans doute moins nettes dans d’autres établissements. C’est là un premier motif de mon désir de m’investir davantage dans les activités de l’ASES pour lutter de façon constructive contre les dysfonctionnements et les diverses difficultés engendrées par la marchandisation de l’université. Ma candidature est également animée par le souhait d’œuvrer à une meilleure diffusion du regard et de la démarche sociologiques. Des expériences (de recherche ou militantes par exemple) me donnent le sentiment qu’il est urgent de promouvoir bien davantage les apports et les enjeux de notre discipline. Je serais ainsi heureux de pouvoir contribuer à l’implication de l’ASES dans les initiatives poursuivant cet objectif, par exemple celle en cours de lancement avec « Savoirs en action ». Au-delà de cette proposition, je serai ravi et honoré de m’impliquer comme administrateur dans la vie et les chantiers en cours de l’ASES. Il me semble en effet que, si la sociologie est aussi une cause à défendre, ce combat commence bien entendu par la production d’outils efficaces pour résister à la précarisation de nos conditions de travail et aux obstacles toujours plus nombreux au bon exercice de notre métier. De ce point de vue, les informations, réflexions et analyses produites depuis plusieurs années au sein de l’association forment selon moi des armes indispensables. Il en va de même des prises de position qui permettent souvent de donner une assise collective à des problèmes singuliers ou d’alerter sur les coups de butoirs généralement discrets dont les sciences sociales font l’objet. C’est donc parce que je considère l’ASES comme un espace pertinent pour mener des actions visant à enrayer le discrédit et la paupérisation des connaissances critiques que je souhaite intégrer son Conseil d’Administration. Jean-Baptiste Comby, le 6 juin 2015

Pascal Martin
Cette année, je brigue un nouveau mandat au conseil d’administration de l’ASES. Je suis actuellement post-doctorant, terme consacré évitant d’utiliser celui de « docteur sans poste » (trop négatif aux yeux des « coach en recrutement ») pourtant plus explicite. En 2012 (année de ma première élection au CA), j’ai soutenu une thèse de sociologie portant sur la réforme de l’Etat social (en l’occurrence celle de l’assurance maladie) et les effets de la « nouvelle gouvernance », adossée au développement des politiques managériales dans une institution ayant une mission de service public. Dans le prolongement de ma thèse, mes recherches actuelles s’intéressent aux différentes formes de développement de « l’Etat social managérial ». J’enseigne dans le supérieur depuis 2008, sous différents statuts : ATER, chargé de cours. En 2009, comme l’essentiel du département de sociologie de Paris 8, je me suis beaucoup investi dans la mobilisation contre la LRU. J’ai poursuivi mon « aterat » à Paris 13. Après quoi, tout en étant chargé de cours, j’ai été bénéficiaire de l’allocation de recherche d’emploi de septembre 2011 à novembre 2013. Depuis décembre 2013, j’ai obtenu deux contrats post-doctoraux : le premier à l’IRIS, le second au LabToP-CRESPPA. Je présente cette nouvelle candidature au CA de l’ASES car j’aimerais prolonger mon investissement dans l’association dont les prises de positions et les actions s’inscrivent, pour moi, dans une trajectoire militante (entamée en amont de la thèse) ; elles correspondent aussi parfaitement à ma conception du métier de sociologue. De plus, je compte continuer d’incarner la précarité qui sévit dans les milieux universitaire et de la recherche. Pascal Martin, le 6 juin 2015