[Semaine de solidarité]
Jour 5 – Connaître Pinar Selek et ses travaux
Malgré l’acharnement de l'État turc, Pinar Selek continue à écrire, à mener ses recherches, à enseigner et à militer. Pendant 25 ans, elle a publié de nombreux articles scientifiques, a écrit des romans et a témoigné de son expérience d’exil.
Ses travaux sociologiques portent sur les mouvements sociaux et l’action collective, sur les questions de frontières et d’immigration ainsi que sur les rapports de domination à partir des exemples de l’armée, de la militarisation et des violences. Grâce à son regard sociologique, Pinar Selek nous a offert des analyses puissantes qui contribuent à renouveler les réflexions épistémologiques et méthodologiques sur la place des sciences sociales en contexte autoritaire, sur la liberté de la recherche et sur l’enquête sociologique comme pratique démocratique.
Au-delà de ces sujets, grâce à sa plume littéraire, elle invite son lectorat à (re)penser le monde contemporain et ses problématiques actuelles : l’immigration, le tourisme, les frontières, l’exil, la condition de vie des femmes et des minorités.
Solidairement,
Le CA de l'ASES
| Avec ce nouveau livre qui réarticule les éléments de ses recherches précédentes, Pınar Selek élargit sa réflexion, nourrie de références philosophiques à nos sociétés toutes entières, régies par un capitalisme effréné et un mépris à l’égard des femmes dans un contexte mondial de guerres et une montée des régimes autocratiques. Un texte fort et nécessaire. Le Chaudron militaire turc de Pinar Selek - Des femmes |
| À travers cinquante-huit entretiens menés avec des hommes de différents âges et milieux socio-géographiques, cet ouvrage s’inscrit dans une démarche d’histoire orale qui vise, plus qu’à cerner objectivement ce qui se passe durant le service militaire, à saisir les souvenirs qu’il a laissés aux anciennes recrues et les discours qui l’accompagnent. Avec ce travail, Pınar Selek nous entraîne à la suite des Mehmetçik dans une expérience saisissante et totale. Premier arrachement au milieu familial pour beaucoup, première et parfois dernière occasion de sortir de leur village – ou à l’inverse, pour les citadins, de connaître des régions rurales éloignées, le service militaire implique un véritable brassage ethnique et de classe, et un tourbillon de nouveautés pour les jeunes gens. |
| À Yedikule, un des plus anciens quartiers d’Istanbul, quatre jeunes épris de liberté cherchent leur place dans une société figée depuis le coup d’État de septembre 1980. La condition des femmes et des minorités, les conventions sociales, l’oppression politique: tout leur pèse. Sema la rêveuse voudrait entrer à l’université. Salih l’apprenti menuisier cherche à perpétuer son art là où il a grandi tandis qu’Hasan le musicien aimerait faire vivre le sien sur les routes du monde. Seule Elif opte pour la voie périlleuse de la révolution. Quatre parcours, mais une même devise : Il nous reste un demi-espoir… Hommage à une ville et à ses communautés, réflexion sur l’appartenance, leçon d’humanité, ce premier roman de Pinar Selek est celui de toute une génération qui cherche sa voie entre la Turquie d’hier et celle de demain.
La maison du Bosphore - Pinar Selek • Éditions Liana Levi |
| Le génocide arménien a un siècle. Une page noire de l’histoire turque, toujours controversée, toujours taboue; un drame qui hante les esprits et les cœurs de génération en génération. Pinar Selek interroge son rapport à cet épisode et à la communauté victime. Au fil des souvenirs et des rencontres, elle raconte ce que signifie se construire en récitant des slogans qui proclament la supériorité nationale, en côtoyant des camarades craintifs et silencieux, en sillonnant Istanbul où les noms arméniens ont été effacés des enseignes, en militant dans des mouvements d’extrême gauche ayant intégré le déni. Au-delà de la question arménienne, ce témoignage sensible, engagé, parfois autocritique, dénonce les impasses de la violence et sonde les mutations de l’engagement collectif.
Parce qu'ils sont arméniens - Pinar Selek |
| « Si on me demande où j’en suis, je réponds que je tiens bon la barre, que j’ai appris à jouer avec les vents qui m’ont d’abord déroutée. Mais je ne peux pas mettre le cap sur le lieu dont je parle, le pays qui me manque ». Loin de chez moi… mais jusqu’où ? dit la douleur de l’exil non choisi et, au-delà, l’espérance et le courage d’une femme libre qui a fait siens ces mots de Virginia Woolf : « Mon pays à moi, femme, c’est le monde entier ». https://pinarselek.fr/publications/livres/loin-de-chez-moi-mais-jusquou/ |
| « Au premier regard, on ne voyait pas, usées à force de passages, les frontières de cette ville de l’exil et du tourisme, ni les chemins empruntés par les Italiens, les Russes et les Anglais, suivis par les Arméniens, les Arabes, les Juifs, les peuples des Balkans et de l’Afrique. Nice, comme les autres villes, ne fait pas entendre sa voix tant qu’on ne s’est pas blotti contre sa poitrine pour pleurer au moins une fois, tant qu’on ne s’est pas couché dans ses bras. Par bonheur, les Zinzins avaient été nombreux à l’entendre : Gouel le Chanteur des rues, Alex le Prince des poubelles, Manu la fondatrice des Paranos et Azucena la Zinzine aux chaussures rouges, celle qui vient de se présenter comme “Bleue”. » P. S. Azucena ou Les fourmis zinzines de Pinar Selek (desfemmes.fr) |
Publications scientifiques récentes | « Musiques anatoliennes en exil : transformations, transgressions », Hommes & migrations [En ligne], 1342 | 2023, mis en ligne le 01 janvier 2024. « Créatrices d'asile : violences et résistances dans les Alpes-Maritimes », Anouchka Stevellia Moussavou Nyama et al., dir. Regards croisés sur les Mobilités et l'Altérité, PUP, pp.71-80, 2022. « Écrire : une forme de résistance à la violence politique et à la violence de guerre », Confluences Méditerranée, 2017/4 (N° 103), p. 125-130. « Résistances des mouvements féministes en Turquie face à la violence extrême de guerre (des années 1980 à aujourd’hui) », Confluences Méditerranée, 2017/4 (N° 103), p. 89-99. « Le mouvement féministe en Turquie, initiateur d’un nouveau cycle de contestation ». Analele Universitatii, Bucarest, 2018. « Construction de l’État-nation turque : prise d’otage des femmes par le Papa “bienveillant” ». État-nation et fabrique du genre, des corps et des sexualités, dirigé par Lucia Direnberger et Azadeh Kian, 2019, p. 113-128. « Enquêter sur ou enquêter avec ? Pour une pratique démocratique de la sociologie », avec Annick Madec et Sylvie Monchatre, Sociologies pratiques, vol. 38, no. 1, 2019, pp. 83-95. « Autonomiser les sciences sociales face à la répression », Liberté de la recherche. Conflits, pratiques, horizon, Mélanie Duclos éd., Éditions Kimé, Paris, 2019, pp. 291-295. |